DANCE! BOOGIE WONDERLAAAAAND | ft. Tao [1980]

Weirdtown, cette ville de l'étrange. Tout ce qui s'y passe est bizarre, et ces bizarreries font désormais partie du paysage de la vie de Xiao. Il s'y est habitué, depuis les longs mois qu'il y a élu domicile, mais ça, ça, il ne s'y serait jamais attendu. Personne n'aurait pu le deviner : la ville a effectué un voyage dans le temps, jusque dans les années 1980, le jour des jeux du stade organisés par Goosebump et les autres boss. C'est la récompense du groupe gagnant, qui a choisi de retourner un étrange sablier comme gain. Etrange ? Oui, on l'a déjà noté. Mais rien de ce qui paraît étrange ne l'est réellement, ici.

Alors, quand des lieux en ont remplacé d'autres, ça ne lui a pas paru plus incohérent ou inexplicable que d'habitude.

Le Malls, où le policier avait l'habitude de patrouiller auparavant, a été remplacé par le Roller Disco ; un classique d'une époque qu'il a à peine connu. Lui est plus familier avec le nouveau karaoke ou la rue des fêtes, mais il n'a pas encore eu l'occasion d'y passer. Non, le lieu qui l'intéresse aujourd'hui, c'est le Roller Disco en question.

Un endroit où il n'irait pas de lui-même, assurément.

Et pourtant, c'est là qu'on l'envoie ce soir. La musique qui s'échappe des portes ouvertes du bâtiment lui indique que ça sera une longue, très longue soirée... Il soupire avant de sortir de sa voiture, garée à quelques mètres de l'entrée, tout de cuir pailleté vêtu - une autre lubie de la ville, visiblement. Le parking est suffisamment plein pour lui faire directement sortir son paquet de clopes et s'en fumer une bonne avant de commencer sa patrouille du soir. Il profite de ces derniers instants de calme relatif avant de pénétrer dans l'enceinte du Roller Disco. La musique lui vrille les tympans. C'est désagréable, mais il prend sur lui.

Xiao observe d'abord l'intérieur depuis l'entrée. L'accueil, le bar, la piste de roller, les toilettes... Il se sent un peu oppressé par la présence de tous ces gens - la piste est noire de monde, tous roulant en rond et dans le même sens, certains plus assurés que d'autres, d'autres tellement à l'aise qu'ils se dandinent et effectuent même quelques pas de danse - mais prend sur lui. Juste un tour, et après il s'en va.

Sa mission ? S'assurer que tout se passe bien, que la musique ne soit pas trop forte pour incommoder le voisinage proche et que tout le monde se tienne correctement. A première vue, tout roule pour le mieux. Après un rapide tour d'horizon et une demande de baisser un peu la musique, le policier se dirige vers le bar, où quelques personnes sont accoudées, entre deux séances de roller, et discutent entre elles. Xiao se glisse à côté d'elles et commande un café - « noir, sans sucre », précise-t-il. De là où il est, il peut parfaitement surveiller les lieux... Aussi, lorsqu'il aperçoit une petite tête qu'il reconnaît bien et qui s'avance tout joyeusement vers lui, il ne peut s'empêcher de songer à quel point il est déjà fatigué de cette soirée.

Ce serait mentir que de dire que Xiao est fatigué. C'est tout le contraire. Il n'est pas fatigué, il est épuisé. Est-ce que la présence de Tao y est pour quelque chose ? Oui, totalement. Et pas que sa présence, non, puisque le concerné l'alpague sitôt qu'il le voit. Le policier retient un soupir lorsqu'il lui demande s'il est en fonction - après tout, il est en uniforme ... Pailleté, certes, mais uniforme en cuir habituel de la police malgré tout.

Il se contente de hocher la tête pour répondre à la question malgré tout, et avant qu'il n'ait pu réfuter son hypothèse, le voilà qui embraye sur sa nouvelle tenue de travail. Ouais, les paillettes, c'est nouveau, bien malheureusement pour lui... Il faut dire qu'à Weirdtown, il n'a guère le choix : il subit bien plus qu'il ne choisit certaines choses, dont son habit de fonction, voir ses propres vêtements. Il s'est réveillé un matin, et pouf, soudainement, certaines de ses fringues avaient changé de couleur, d'autres s'étaient parées de petits paillons argentés à l'instar du cuir de son uniforme. A son grand damn.

Bienvenue dans les années 80.

Heureusement, son écharpe bien aimée a été épargnée, et il a pu conserver une partie de ses tenues intacte. En espérant un retour à la normale d'ici peu...

« C'est venu avec les derniers changements de la ville, se contente-t-il de répondre en haussant les épaules. Cool... Ouais, bof. Ca le rend plus visible, surtout ce soir sous les spots lumineux du Roller Disco.

Et soudain, c'est le drame.

Tao veut l'emmener sur la piste.

Cette fois-ci, Xiao soupire pour de bon.

- Non, répond-il fermement, comme pour couper court aux éventuelles protestations. Je ne suis pas là pour m'amuser, je suis en service, Tao. »

Sur ce, il engloutit son petit café avant de reposer la tasse sur son support, sur le bar. Machinalement, il ne peut s'empêcher de zyeuter ladite piste, où nombre de gens continuent de tourner. Lui, faire du roller ? Pffff.

Et puis quoi encore ?

Tao, c'est le pote un peu chiant du groupe. Celui qui insiste pour faire les pires conneries et qui entraîne tout le monde avec lui. Et Xiao ne peut rien faire si ce n'est le subir pendant de longues minutes, alors qu'il tente de le convaincre d'aller sur la piste de rollers.

Ce qu'il ne tient absolument pas à faire.

Aucun de ses arguments ne fait mouche, et le policier n'en fait que tirer une tête de six pieds de long. Il l'observe tandis qu'il parle, parle, parle... tout en étant incapable d'en placer une.

« Je crois que personne ne dira quoi que ce soit si vous essayez la piste. La mentalité n'a pas aussi changé ? Et puis, y'a personne d'autres que vous de la police, aucun collègue pour rapporter et moi, je serais muet comme une carpe !

- Je ne veux pas aller sur-

-Et en plus, sur la piste il se passe encore plus de chose qu'ici, s'il y a un problème, vous serez encore plus proche pour agir ! Vous pouvez autant vous amuser que travailler ! C'est ce qui fait un peu le charme de cette ville, non? On peut tout faire !

- Je ne suis pas là pour m'amuser mais pour-

-Oh, je vais vous prendre des rollers, bougez pas ! Vous avez quoi comme pointure...?

- Tao, je-

Et c'est déjà trop tard : le voilà parti, ses propres rollers en main. Xiao soupire en constatant que rien ne semble pouvoir l'arrêter, puisque le voilà qui réapparaît déjà, deux paires sur lui, pour l'entraîner tout de suite ailleurs. Pris de surprise et, surtout, pris d'une certaine lassitude, il ne résiste pas.

Les voilà en un rien de temps devant la piste de rollers, Tao lui demandant d'enfiler la paire qu'il lui a ramené. Xiao la fixe avant de remonter les yeux vers l'adolescent à la queue de singe. Quelque chose lui dit qu'il n'abandonnera pas l'idée de le mettre sur cette fichue piste.

- Je n'ai jamais dit que je voulais faire du roller réussit-il à lui dire, maintenant qu'il se tait enfin. Tu ne me lâcheras pas tant que tu ne m'auras pas emmené sur cette piste, hein ? lui demande-t-il, dépité. Il lâche un long, profond soupir avant de s'emparer de la paire de rollers à contre-coeur, se doutant déjà de la réponse. Ca se voit qu'il n'a pas envie, mais il est complètement désabusé par l'attitude de Tao. Il se souvient de la nuit qu'il a passé à attendre Qiaoying au commissariat, l'autre jour. Nouveau soupir.

La soirée va être longue. Très longue.

Il enfile toutefois la paire de rollers, n'attendant qu'une chose : que ce mauvais moment ne passe. Ils sont un peu grands, mais rien qui soit trop gênant.

- Un seul tour. » le prévient-il en se mettant debout, étonnamment assez à l'aise sur les patins à roulettes, à son grand étonnement. Mais une fois qu'il tente de faire un pas, il glisse et manque de faire le grand écart. Il se rattrape au bord de la piste. Bon équilibre, mais ça ne suffit pas, visiblement. Il se remet droit, et tente d'appréhender le nouveau moyen de location dont il est doté. Le deuxième pas est un peu mieux, le troisième plus assuré.

Xiao décide donc d'offrir au demi-singe un tour de piste avant de se remettre à travailler. Et puis, comme Tao le lui a si bien dit, il aura une vue imprenable sur le groupe de gens actuellement en train de patiner... Un peu de vrai dans le baratin qu'il lui a sorti, tout à l'heure.

Alors le voilà qui met un pied au milieu de la foule, à son grand regret, sur un air d'ABBA.

Xiao remarque que le jeune demi-singe s'apprête à lui prêter main forte pour se relever. Mais il n'a pas besoin de lui, preuve en est s'il en faut le fait qu'il se relève bien vite seul. Il le sent l'observer pendant qu'il s'habitue à son nouveau moyen de déplacement.

« N'y pense même pas, lui assène-t-il d'un ton on-ne-peut-plus sec. Il ne manquerait plus que ça : qu'il soit obligé de se déplacer avec ces outils du démon tous les soirs !

Voilà qu'il lui colle une petite tape dans le dos, comme s'il voulait se montrer amical. Ca fait se pencher le policier d'une poignée de centimètres en avant, avant qu'il ne lui jette un regard mauvais. Un regard qui signifie clairement : "Recommence, et tu vas regretter amèrement ce que tu viens de faire."

Ils finissent toutefois par s'avancer tous deux sur la piste, Tao en premier, prêt à lui montrer "un truc trop cool" alors qu'ils s'insèrent rapidement dans la masse d'inconnus. Le policier toujours en fonction lui lâche un simple "Hmm" comme réponse, ce qui semble convenir à Tao puisqu'il s'exécute dans la foulée, réalisant un backflip relativement spectaculaire malgré un atterrissage bancal. Xiao ne fait pas un mouvement pour le rattraper, mais le demi-singe n'en a pas besoin, visiblement, de toute façon.

Ce qu'il pense du roller disco, lui demande-t-il ? Pas grand-chose, aussi se contente-t-il de hausser les épaules en roulant aux côtés de l'adolescent. Il se débrouille plutôt bien pour un néophyte, peut-on constater.

- Je suis plus intéressé par les raisons qui ont opéré ce changement inopiné que par le lieu en lui-même, finit-il par lâcher entre deux chansons. Il est vrai que si la ville n'en fait qu'à sa tête, comme à son habitude, c'est tout de même là un changement majeur qui n'a absolument aucune explication. Après une recherche plutôt simple à exécuter, il a appris qu'effectivement, le Roller Disco était le bâtiment se trouvant à la place du Malls dans les années 80, mais aucune trace du pourquoi du comment ils se sont retrouvés à cette époque.

Enfin...

Si, peut-être bien. Tout semble avoir changé après les jeux du stade, où un mystérieux sablier a été confié aux gagnants. Il n'en sait pas plus, si ce n'est qu'ils ont gagné le droit de le tourner. Mais rien, aucun moyen de retrouver ce sablier : il semble avoir tout bonnement disparu de la ville après cela. Est-il lié au changement d'époque ? Il n'a pas vraiment pris la peine d'enquêter là-dessus mais, du peu qu'il en sait, aucune trace d'un quelconque sablier dans l'historique de Weirdtown. En tout cas, de ce qu'il en connaît. Autrement dit : pas grand-chose.

Tao grimace au changement de musique.

- Qu'est-ce que tu fais ici si tu détestes la musique ? », lui demande-t-il, à raison, suite à sa remarque. S'il n'aime pas le disco, peut-être n'aurait-il pas dû venir en ces lieux, justement nommés Roller DISCO...

A peine ont-il eu le temps d'échanger quelques mots que déjà, les revoilà à leur point de départ. Mais Xiao, après avoir ricané face à la piètre explication de l'adolescent à la queue de singe, continue à rouler comme si de rien n'était, sans doute à la grande surprise de Tao.

Ce n'est guère une maladresse de sa part ; en réalité, il a tout planifié et a continué à tracer sa route en toute connaissance de cause. Le policier repense à ce que Tao lui a dit juste avant : les jeux ne l'intéressent peut-être guère, lui qui n'a ainsi pas pris part à ceux du stade - que ce soit en y participant ou en les regardant - mais l'histoire du sablier, ça, ça l'intéresse. Alors peut-être qu'en détournant l'attention du livreur en le faisant rouler encore en sa compagnie suffira à lui faire répondre à ses questions. Après tout, Tao peut sans doute lui fournir de précieuses informations sur ce fameux sablier.

« Tu as donc participé aux jeux du stade ? commence-t-il par lui demander avant d'embrayer sur une autre question, ignorant sa remarque sur le fait de "moisir sur place". Tu veux dire qu'il est possible de retrouver ce sablier ?

Ca sonnerait presque comme un interrogatoire. Peut-être bien parce que c'en est un. Un peu informel toutefois, il faut bien l'avouer, mais on ne pourra pas dire que Xiao n'y met pas du sien. Après tout, le voilà en train de patiner au milieu d'une foule de gens - tout ce qu'il déteste !

A côté d'eux, un homme se gamelle. Xiao l'esquive comme si de rien n'était, sur le refrain d'une nouvelle chanson..

- Qu'est-ce qu'il s'est passé, au moment de la remise des prix ? » Il finit par poser LA question. Celle que tout le monde se pose. Car personne n'a été foutu d'y assister, contre toute attente - encore une bizarrerie à laquelle ils se sont tous habitués.

Mais peut-être que Tao, lui, a la réponse ?

Si Tao a l'air surpris, Xiao ne lui en tient pas rigueur. Il veut simplement des réponses à ses questions, et le jeune adolescent ne tarde pas à lui en donner. Il a même la langue plutôt bien pendue, pour son plus grand bonheur - voilà des informations bien utiles qu'il lui confie !

Ainsi, tous les boss auraient participé aux jeux du stade. Bon, ça, il le savait déjà - c'est ce qu'il s'est passé ensuite qui l'intéresse. Tao évoque celui adoré par les croyants, le Créateur. L'être qui aurait crée Weirdtown existerait donc réellement ? Et ce serait un enfant ? Enfin, ce dernier fait ne l'étonne guère. Après tout, le maire lui-même n'a-t-il pas la forme d'un jeune enfant innocent ? Mais tout de même, cette histoire de Créateur retrouvable l'inquiète un peu...

Tao fait le récit de la cérémonie de remise des prix, et les récompenses font tiquer le policier. Retrouver ses souvenirs, lever une malédiction et le temps. Ainsi, si Tao dit vrai - et Xiao ne peut imaginer aucune raison de lui mentir -, alors les gagnants des jeux seraient responsables du changement d'époque. Mais en quoi cela est-il une récompense, comparé aux souvenirs retrouvés ou à la levée d'une malédiction ? Qu'ont-ils à gagner à revenir aux années 80 ? Et cette époque qui serait avec des "prérequis" ... De quoi voulait-il bien parler ?

« De quels prérequis parlait-il ?

Le Créateur serait-il une sorte de maître du jeu et les habitants de Weirdtown, ses pions qu'il manipule à sa guise ?

Rah, c'est si rageant de ne rien savoir !

Toutefois, une chose est sûre : cette entité est très puissante. Du moins, elle a suffisamment de pouvoirs pour leur redonner des souvenirs perdus... ou pour lever une malédiction. Ce dont ne serait même pas capable le maire (ou plutôt, ce sur quoi il refuse d'avoir une quelconque influence) alors qu'il a fait preuve d'un pouvoir infiniment puissant. Une entité peut-être même plus puissante que les Boss eux-mêmes, et c'est dire !

Pris en pleine réflexion, il met un certain temps avant de répondre à la question de Tao.

- Je ne sais pas, se contente-t-il de dire sans élaborer davantage - Tao l'a fait à sa place. A choisir... Non, il n'aurait rien choisi.  Aucun des trois ne me satisfait. Il n'est victime ni d'une malédiction, ni d'une bénédiction ; agir sur le temps et avoir un impact sur tous les habitants serait fortuit ; quant à retrouver ses souvenirs...

Sa mine s'assombrit : il n'est pas certain de vouloir se souvenir de son défunt mari. Il en est même sûr et certain.

Aimerait-il toujours Kyô, s'il se souvenait de son passé ? Serait-il capable d'aimer deux personnes, ou de passer outre son ancien amour ?

Il n'a pas la réponse à cela. Pire encore : elle lui fait peur.

Le policier se range sur le côté une fois leur nouveau tour terminé, et s'assoit sur un banc placé à disposition des usagers. Les enceintes crachent une nouvelle musique 100% disco, 100% trop forte... 100% trop appropriée à ses dernières pensées. Son coeur se serre un peu, mais il tâche de ne rien laisser transparaître.

- Merci pour ces informations. », fait-il tout en défaisant les lacets de ses rollers.

La partie est terminée.

Tao finit par le rejoindre sur le bord de la piste, sur les bancs situés de part et d'autre de l'entrée. Il est silencieux, tout comme la policier, sauf que lui, ce n'est pas normal. Tao est tout sauf silencieux. Il finit par prendre la parole, tandis que Xiao retire l'un de ses rollers et le dépose sur le côté ; sa chaussette pailletée brillant sous les feux des projecteurs.

L'adolescent mi-homme mi-singe s'excuse finalement pour l'avoir forcé à venir sur la piste. Xiao soupire, faisant une pause après avoir délacé son autre chaussure à roulettes.

« Ce n'est pas grave, lui répond-il simplement, les coudes sur les genoux, affalé en fixant le sol. Nouveau soupir. Ne force plus les gens à faire ce qu'ils n'ont pas envie de faire, d'accord ? Ce sera le moyen de se faire pardonner.

Il lui propose cependant de lui offrir une boisson. Son regard quitte le sol pour venir se poser sur le bar une seconde. Oui, il a bien besoin de boire quelque chose pour se remettre de ses émotions. Malgré son côté un peu chiant (voire complètement relou), Tao est quelqu'un de bien, qui semble se soucier des autres.

- Un café noir, sans sucre et bien chaud. » se contente-t-il de commander auprès de lui, résistant à la tentation de commander quelque chose d'alcoolisé. Non, boire pour oublier n'est pas la solution, surtout pas en service. Un café suffira, songe-t-il alors qu'il regarde Tao se diriger vers le bar.

Nouveau soupir.

Il est fatigué de tout ça. Fatigué de repenser, parfois, à son défunt mari sans réussir à se souvenir ne serait-ce que de son visage. Ou de son nom. Ou de sa façon d'être.

La seule chose qui subsiste, c'est un ersatz d'affection et d'amour qui viendrait presque parasiter son amour pour Kyô.

Le policier secoue la tête, comme pour tâcher d'ôter ces vilaines pensées de son esprit, soupire de nouveau, et se force à revenir vers le roller toujours à son pied. Il l'enlève, puis va échanger la paire contre ses rangers de fonction le temps que Tao revienne.

Tao semble avoir compris la leçon, et c'est tant mieux. C'est un brave garçon, songe-t-il finalement en laçant ses rangers. Il libère ensuite le banc pour qu'un couple d'adolescents s'y installe à son tour, se dirigeant vers une table adjacente pour que Tao le repère plus facilement. Il aurait pu le rejoindre au bar, il est vrai, mais la perspective de devoir se fondre dans la masse ne l'enchante guère.

Il ne faut que quelques minutes pour que l'adolescent ne le rejoigne finalement, son café dans les pattes. Ledit policier, comme l'a apostrophé Tao, récupère son présent par le bord du gobelet fumant en le remerciant d'un geste de tête.

Pas tarder à rentrer, c'est une bonne idée. Xiao a encore du boulot de son côté, et ce n'est pas plus mal. Cela lui permettra de penser à autre chose, il en a bien besoin. Se plonger dans le travail corps et âme a toujours été sa façon de gérer ses émotions, et aujourd'hui ne fait pas exception. Mais ça, Tao n'a pas besoin de le savoir.

Le jeune homme lui demande, avant de partir, si ça va. Ca se voit tant que ça que non, ça ne va pas fort ? Damn.

Le policier boit une gorgée de liquide noir, se brûlant la langue, le palais, et la gorge au passage. Cependant, rien ne transparaît sur son visage, et il se contente de balayer les inquiétudes de l'adolescent simiesque d'un revers de la main.

« Je vais bien, ne t'en fais pas, le rassure-t-il. Tao n'a pas besoin d'en savoir plus sur ses états d'âme. Il ne se fâche même pas sur l'emploi du terme « ronchon », et laisse couler. A vrai dire, il n'en a que faire.

- Rentre bien, Tao. », lui souhaite-t-il, mettant ainsi un terme à leur conversation.

Il ne regrette toutefois pas leur entrevue, malgré sa fin quelque peu prématurée. Xiao a ainsi pu comprendre ce qui s'est passé lors des jeux du stade, et apprendre l'existence du sablier... ainsi que du créateur lui-même, visiblement ? Ca fait beaucoup d'informations à emmagasiner, mais ça ne fait rien. C'est le prix à payer pour obtenir des informations sur le fonctionnement de cette ville étrange.

Une fois Tao parti, le policier reste un instant pensif, avant de terminer son café d'une traite. Il jette le gobelet à la poubelle, et se dirige à son tour vers la sortie.

Il a encore du travail, ce soir.