Ca y est, c’était le grand jour !

Aujourd’hui il accueillait Xiao chez lui, pour ce qui devait être l’éternité. Comment savoir quand la vie s’arrêtait vraiment dans une ville comme Werdtown ? Mais c’était le premier jour de leur vie ensemble, en tant que couple.

Kyô était tout excité. Il n’avait pas dormi de la nuit tant il avait attendu cet instant, enchaînant café sur café pour tenir la nuit, provoquant de larges cernes sous ses yeux. Il fallait dire que ces derniers temps, il avait enchaîné les grosses pièces au travail. Le tatoueur n’avait pas ménagé ses efforts pour offrir un niveau de vie décent à Xiao, qui enchaînait déjà deux travails.

Pour la première fois, Kyô avait du faire de la place pour quelqu’un d’autre dans sa maison. Il avait vidé un placard dans la chambre pour les affaires de Xiao, fait de la place dans le salon pour installé l’arbre à chat de Kutsu. Il avait fait des achats aussi, se doutant insidieusement que Xiao n’était pas du genre à avoir, par exemple, plusieurs tasses, ou autres. Alors il avait fait une razzia sur les tasses les plus mignonnes, les couverts les plus beaux, les assiettes les plus colorées.

Kyô avait également organisé une petite fête pour l’arrivée de Xiao à son domicile. Oh, rien de vraiment extravagant, juste un peu de musique, des petites choses à picorer, et c’était concrètement le tout. Ils n’avaient pas vraiment d’amis à inviter pour célébrer ce nouvel évènement de leur vie. En tout cas, Kyô se voyait mal inviter la petite Katinka à venir fêter ce jour avec eux.

On toque à la porte, et automatiquement, un large sourire se dessine sur le visage de Kyô. Il s’en va pour ouvrir et trouve Xiao avec son air renfrogné, comme d’ordinaire. Mais le bleu ne s’en formalise pas, et se penche pour embrasser son conjoint, avant de l’inviter à entrer, se saisissant du carton laissé à ses pieds.

Il ne faut pas énormément de temps aux deux amoureux pour finir de vider la voiture du policier-enseignant, en un aller-retour, c’était plié. Et finalement, ils se posent dans le canapé du salon, la caisse de Kutsu sur les genoux de Xiao. Chat avait observé leur étrange manège sans comprendre, mais maintenant qu’il avait repéré le nouvel arrivant, c’était la sérénité du foyer qui entrait en jeu. Les deux animaux arriveraient-ils à s’entendre ?

Kyô avait confiance en le côté bonne patte de Chat pour accepter la présence d’un nouveau congénère, mais Kutsu réagirait-il de la même manière ?

Kyô avait bien observé le petit manège de Chat et Kutsu. Kutsu qui avait d’ailleurs dédaigné Chat pour aller s’installer bien paisiblement sur son arbre à chat, tranquillement posé, sans se soucier de Chat. Mais c’était sans compté là sur la curiosité du petit rouquin qui, bien que plus petit et taille et en âge, n’hésita pas un seul instant à venir grimper sur l’arbre à matou pour guetter une quelconque réaction de son homologue. Malheureusement pour lui, celui-ci s’en moque complètement, totalement fasciné par le ciel clair et l’absence de neige dans le grand dehors, arrachant un rire à Kyô.

« Je crois que Chat n’apprécie pas d’être ghosté comme ça. » fait-il entre deux éclats de rire.

Puis il se tourne légèrement vers Xiao pour se détourné complètement des animaux. Xiao est, comme toujours aux yeux de Kyô, absolument parfait. Son écharpe en lambeau autour du cou lui donne envie de la lui retirer pour mieux observer son visage, mais il sait que Xiao n’appréciera pas. Et alors qu’il l’observe, un léger rougissement sur ses joues, un sourire naît sur ses lèvres.

Rapidement il vient se lover tout contre Xiao, l’écrasant presque contre le canapé, laissant sa tête reposer contre son torse. Il ferme les yeux pour savourer l’instant, tout nicher contre son amoureux qu’il est, se sentant finalement complet qu’il ait fini par accepter de venir s’installer chez lui.

Il se souvient du jour où il avait proposé, comme ça, au détour d’une conversation, s’il n’était pas mieux qu’ils s’installent ensembles. Il avait amorcé tout un tas davantage, notamment le fait qu’il n’aurait pu à prendre le métro pour aller le voir -chose qui le rendait très inconfortable- et que Xiao n’aurait pas à dépenser de l’essence pour venir le voir ici. Il avait rougit de manière incontrôlable, détournant le regard presque de honte de lui demander ça, mais Xiao s’était contenté de poser une main sur sa joue et d’accepter.

« Je suis si content de t’avoir à la maison maintenant. Je t’ai acheté pleins de tasses ! Pleins de couverts, pleins d’assiettes, pleins de protection hygiénique si jamais tu as un soucis. Je veux vraiment que tu te sentes comme chez toi ici, parce que c’est chez toi maintenant. »

Xiao dépose un baiser sur son front, et c’est la sensation qui lui donne l’impression d’être l’homme le plus heureux de Weirdtown. Certes la vie ici avait été parfois difficile, mais avec Xiao à ses côtés, Kyô savait que plus rien ne saurait jamais l’arrêter. D’ailleurs, il s’en fit le serment : oui, avec Xiao avec lui, tout lui réussirait.

Il était déjà sa muse, sa source d’inspiration la plus aboutie. Il lui suffisait de penser à lui, d’imaginer son visage, les courbes de son corps quand ils faisaient l’amour, pour retrouver son âme d’artiste.

Leur maison. Kyô rougit presque à cette pensée. Il niche son visage contre le torse plat de Xiao, humant son odeur, qui envahirait bientôt toute la pièce, toute la maison, pour ne faire qu’un avec sa propre odeur, créant un mélange des deux qui serait aussi unique qu’agréable.

« J’ai l’impression que c’est un rêve… » marmonne le plus grand avant de se pincer, laissant échapper un « Ouille ! » de surprise.

Kyô ne peut pas imaginer le trouble qui s’est emparé de Xiao à la pensée de son défunt mari, simplement parce que pour lui, c’était sa première expérience de la chose. Oh, bien sûr, il se doutait qu’avant d’arriver à Weirdtown il avait du vivre des expériences amoureuses, mais elles avaient toutes été rayée de sa mémoire depuis.

Il redresse la tête pour observer le visage de son amoureux, et un sourire naît sur ses lèvres. Ses joues n’en sont pas moins pourpres, alors qu’il avance une main pour venir la nicher contre la joue de Xiao.

« Est-ce que tu es heureux ? » demande t-il en s’approchant encore pour capturer ses lèvres avec les siennes en attendant la réponse.

Kyô accueille avec un sourire la réponse Xiao et s’en va poser ses deux mains sur ses joues, effleurant du bout des pouces les pommettes de son aimé avant de l’admirer silencieusement, comme on contemple une oeuvre d’art. Xiao était la plus belle chose qu’il ait vu de mémoire depuis son arrivée à Weirdtown. Et maintenant, il était aussi la plus importante. Sa moitié.

Il lui dit qu’il l’aime, et là, Kyô sent son coeur loupé un battement. Ces mots là lui font toujours quelque chose de très particulier. Un sourire timide se dessine sur ses lèvres, et il colle son front au sien en fermant les yeux. Lui aussi l’aime, plus que tout, à un tel point qu’il ne s’est senti entièrement vivant que depuis leur rencontre.

« Moi aussi je t’aime, plus que tout. » répond t-il néanmoins, peu désireux de laisser cette marque d’affection sans réponse.

Xiao, maudite sirène qui l’avait envouté avec sa voix rauque et son air renfrogné. Comment aurait-il pu résister ? Lui qui avait un profond désir de rendre tout le monde heureux s’était retrouvé face à un être que rien ne semblait pouvoir contenté. Et maintenant, il l’avait, lui, et ça le rendait heureux. Ça les rendaient heureux. Cet amour au moins aussi inattendu qu’inconcevable à la base, et pourtant si évident pour Kyô dés qu’il avait posé les yeux sur lui… Un sentiment inexplicable et qui l’avait simplement submergé.

Il finit par se redresser pour libérer son amoureux de son emprise, et se lève presque instinctivement pour aller lui faire un café. Il revient dans le salon avec deux tasses fumantes, colorées et pleins de motifs de chats. Tout pour plaire à Xiao.

« Tu peux manger si tu as faim. Je suppose que tu n’as pas fais de vrai repas pour le moment. » fait-il en s’installant de nouveau près de son amant, lui tendant la tasse à motif chat noir, gardant la bleue pour lui.

Sur la table basse était en effet disposés des biscuits au miel, des sashimis, des sushis, du kaarage, et autres gourmandises sucrées que Kyô avait préparé en guise de repas le matin même, juste pour lui.

Xiao lui sourit et Kyô sent son coeur fondre dans sa poitrine. C’était toujours le plus beau cadeau qu’il pouvait lui faire, après tout. Sa remarque sur le fait qu’il arrivait toujours à tout anticiper lui tire un léger rire, et il passe un bras autour des épaules -largement plus fine que les siennes- de Xiao.

« Je te connais mon amour, c’est tout. » fait-il avec un sourire pendant que le brun se sert. Il l’observe savourer son morceau de kaarage, se demandant si la recette qu’il testait était bonne, avant d’obtenir confirmation de la part de son amoureux. Parfait ! C’était tout ce qu’il désirait.

Il s’en va déposer un baiser sur la joue de Xiao avant de s’emparer d’un sashimi de saumon, fait maison lui aussi, trempé dans une sauce soja étrangement sucrée qu’il avait trouvé dans le Quartier Caucasien.

Et puis, il se met à réfléchir. Peut-être auraient-ils dû investir dans une maison plus grande, après tout, la Tiny House de Kyô était confortable pour lui seul, mais Xiao y trouverait-il son plaisir ? Les nombreuses fois où ils s’étaient réuni en ces lieux, ça n’avait pas posé problème, mais c’était rarement plus que pour un week-end.

Il n’a pas le temps de faire part de ses préoccupations à Xiao que Chat et Kutsu se radinent, attirés par l’odeur du poisson sur la table basse. En bon matou qu’il est, Chat s’en vient se frotter aux jambes de Kyô, réclamant un petit morceau de thon, son poisson préféré, alors que Kutsu miaule.

Kyô s’empare d’un sashimi de thon et le découpe en deux pour donner un morceau à chacun, avec un soupir.

« C’est comme avoir des enfants finalement, sauf qu’ils sont indépendants et poilus. » fait-il avec un sourire, se tournant vers Xiao.

Kyô regarde les chats se régaler de poissons quand une question de Xiao le tire de sa vision. Les enfants. Ah. Grosse question en effet.

En voyant la bouille déprimée de son amoureux, il devine que Xiao n’en veut peut-être pas. Et en vérité… Eh bien, ça lui convient. La vie ne valait pas la peine d’être vécue s’il ne pouvait pas la vivre avec son amoureux, enfants ou pas, ça ne changeait rien à cet état d’esprit.

Alors il tasse un peu plus le corps de Xiao contre le sien et dépose un baiser sur son front.

« Je vois bien que cette question t’inquiète Xiao. Mais c’est plutôt à moi de la poser. Certes on fait un enfant à deux, mais c’est toi qui le portera alors c’est à toi de décider. Qu’importe ce que tu veux je te suivrais, sois en sûr. Ne doute pas de ma capacité à t’aimer malgré les obstacles. » fait-il en posant son menton sur le haut du crâne de Xiao. Il ferme les yeux un instant. S’il devait renoncer à sa peut-être paternité pour Xiao, alors c’était un sacrifice qui en valait la peine.

Il n’était pas arrivé à Weirdtown depuis longtemps, mais presque toute son aventure c’était construite avec Xiao, alors il était hors de question de l’abandonner maintenant, surtout après qu’il ait été présent pour les moments les plus intenses de ce que sa mémoire pouvait se souvenir.

Et puis avec des enfants, il était sûr que l’un des deux devrait abandonné sa carrière, et leur carrière était trop précieuse pour être reléguée au second plan à cause d’un petit polichinelle dans le tiroir.

Xiao ne veut pas d’enfants, et ça lui va très bien. Kyô préférait vivre dans le regret de ne pas avoir eu des enfants plutôt que de perdre celui qui était tout son univers, son monde entier, son soleil et ses étoiles.

Une idée lui vient en tête, alors il pouffe légèrement de rire et, sentant l’air interrogateur de Xiao, il dévoile la bêtise qui lui est venue en tête.

« On pourra toujours prendre un troisième chat, au pire. » fait-il avec un léger rire.

Ou même un chien ! Après tout, Kyô avait cette énergie de golden retriever boyfriend, et Xiao celle d’un chat noir, alors pourquoi pas prendre les deux ? Imaginer le chaos que cela pourrait provoquer dans la tiny house du bleu lui tire une risette.

Sans quitter les bras de son aimé, il attrape un sushi avec ses baguettes et le glisse dans la bouche de Xiao. Son côté maternant reprenait vraiment le dessus quand il s’agissait de son amoureux.

« Tu ne manges pas assez Xiao. Est-ce que tu as pu dormir après ton shift cette nuit au moins, ou il faut envisager une sieste avant de défaire les cartons ? » demande t-il sur un ton inquiet. Si Xiao admettait ne pas avoir dormi, il l’emmènerait au lit - leur lit - immédiatement, quitte à le porter sur son épaule si le chinois montrait de la résistance.

Kyô gobe le morceau de saumon sans se presser, mais reporte rapidement son attention sur Xiao.

« Tu ne m’auras pas avec du poisson ! » fait-il sur un ton faussement héroïque, avant de saisir Xiao par les cuisses et de le jeter sur son épaule.

Là, il se relève, dépose un couvercle sur la nourriture pour que les chats ne s’en fassent pas un festin, et se dirige d’un pas lourd vers la chambre. Une fois arrivé là-bas, il dépose Xiao sur le lit, et s’assoit près de lui pour le dissuader de s’en aller de là.

Il lui retire ses chaussettes, et commence à lui masser les pieds avec tendresse, constatant la fatigue du policier.

« Tu es fatigué, ne dis pas le contraire. Je le vois bien. » fait-il avec une moue boudeuse. « Laisse moi m’occuper de toi maintenant. »

Après tout, avant qu’ils n’emménagent ensemble, Kyô n’avait pas la main mise sur la manière dont Xiao s’occupait de son sommeil, de son alimentation. Maintenant, il prendrait grand soin de lui, s’assurant qu’il ait son quota d’heures de sommeil par nuit, ainsi qu’un bento prêt tous les midis pour le travail. Sous son toit, il se le promit, Xiao ne manquerait plus jamais de rien, de la tendresse à tout ce qui pouvait faire son quotidien.

Kyô grogne légèrement à la mention de Xiao sur le fait qu’il s’occupe suffisamment de lui. Bien sûr, il n’était pas de cet avis ! S’il le pouvait, il s’occuperait davantage de son amoureux, et Xiao n’aurait pas à souffrir d’un manque de sommeil ou de problème d’alimentation.

« Je pourrais m’occuper de toi encore mieux. » fait-il avec une moue boudeuse, reposant ses pieds sur le lit pour venir s’allonger à côté de Xiao. Là, il pose une main sur sa joue. Sa main est si grande par rapport au visage si fin de son petit ami. Kyô à l’impression d’être un géant à côté de lui.

« Repose toi, je reste à côté de toi. » déclare t-il en laissant sa tête reposer sur l’un des oreillers du lit, prêt à fermer les yeux et à dormir à côté de lui. Après tout, cette matinée se prêtait bien à une petite sieste en amoureux, non ?