Alone again [ PV Orion]

Orion vient d'arriver au quartier asiatique. Il chantonne doucement l'air d'une chanson pop du moment, qui passe souvent à la radio, tandis qu'il revient de la forêt - du camp des scouts, plus précisément. Il a passé une partie de la journée à réagencer une partie du camp, à ranger des boîtes et des cartons en tout genre, et c'est une fois qu'il eut terminé qu'il décida de rentrer chez lui.

Il n'avait plus rien à faire au camp, aussi le voilà donc qui pénètre au sein de son quartier, jouxtant la forêt - comme c'est pratique pour lui.

Il se promène un peu avant de rentrer, profitant du beau temps printanier qui fait la réputation du coin. Il pourrait aller lire près du sanctuaire... ou à la maison de thé, tiens. En plus, il a un tout nouveau roman de fantasy acheté il y a peu !

C'est donc une occupation toute trouvée. Le jeune fantôme se dirige donc vers sa petite maison, en plein centre, voletant joyeusement. Il a son petit costume sur lui, comme à son habitude, et celui-ci flotte tout autour de lui à chacun de ses mouvements.

Il n'est pas difficile de voir qu'il s'agit là d'une créature, parfois mal accueillie en ville, mais Orion, n'ayant jamais eu de problème, se dit qu'ici, "tout le monde il est gentil". Alors il continue de flotter au gré de ses envies - sans s'avouer que c'est parce qu'il a du mal à agir "comme un humain".

C'est donc tout flotillant qu'il passe à côté d'une maison où un chien vagabonde dans le jardin. Ce dernier, sentant l'arrivée du jeune fantôme, se met à aboyer en sa direction, l'effrayant subitement. C'est donc avec un cri strident que le fantôme se réfugie dans... une poubelle.

Poubelle qui se met donc à trembloter de peur, de manière absolument peu naturelle.

Mais le chien finit par se calmer, et Orion le voit s'approcher du récipient à ordures, avant qu'une femme sorte de la maison et se mette à crier quelque chose. Sans doute son nom, puisque l'animal court dans sa direction et la suit à l'intérieur de l'habitat dont la porte d'entrée se referme derrière lui.

Il pousse un soupir de soulagement, et parvient sans peine à sortir des ordures. C'est là qu'il apparaît devant un jeune garçon, visiblement caché derrière la poubelle, qui jette un coup d'oeil en direction de ladite maison - un autre fantôme ! Il le constate très rapidement, voyant l'individu flotter au-dessus du sol lui aussi.

Orion sourit, et agite la main pour le saluer. Il n'est pas compliqué de comprendre que lui aussi a été apeuré par l'animal.

« Je suis désolé... C'est à cause de moi si le chien a aboyé ! fait-il d'un air ennuyé, une main dans ses cheveux de gêne. Il est parti, tu peux sortir !

Le jeune garçon ferme les yeux, et semble espérer très fort quelque chose. A-t-il eu peur d'Orion ? Oh, non ! Il culpabilise un peu, et agite les mains de stress, s'excusant encore une fois. Le petit finit par rouvrir les paupières, et prend la faute sur lui. Pourtant, il n'a rien fait de mal...

« Oh non, c'est normal d'avoir été surpris par le chien ! lui répond-il avec l'espoir de le mettre plus à l'aise.

Lui-même est un grand trouillard, il ne peut s'en cacher. Après tout, ne s'est-il pas tout de suite caché dans une poubelle en entendant les aboiements de l'animal ?

Le brun finit par sourire, timidement, et sort de derrière la poubelle. Les deux enfants se tiennent donc face à face, et Orion peut le détailler un peu plus aisément. Ce n'est encore qu'un gamin, plus jeune que lui, et déjà un fantôme ... ? Oh non, c'est si triste. Il semble encore un peu apeuré, surveillant les alentours comme s'il craignait une attaque surprise.

Et soudain, le voilà qui se précipite derrière l'adolescent aux cheveux verts. Pris de peur à son tour, ce dernier lâche un cri strident et lève les bras, comme pour se protéger d'un monstre invisible. Il ferme les yeux à son tour, prêt à encaisser un quelconque choc...

... Mais rien ne vient.

Il entrouvre un oeil, ne voit rien, ouvre le deuxième. La rue est quasiment déserte, à l'exception d'un homme-poulpe qui vient de passer à côté d'eux, un sac de courses dans les bras.

La voix tremblante du petit se fait entendre.

- U-un monstre... ? demande Orion, sans comprendre, jetant un oeil autour d'eux une nouvelle fois, la peur au creux du ventre. Tu parles du chien de tout à l'heure... ? Ce n'est pas un monstre, juste un petit chien qui a eu peur. », lui explique-t-il sans se douter qu'il parlait de la créature désormais loin d'eux.

Il lui sourit en se dandinant sur ses petites jambes, légèrement stressé par le monstre.

Comment ça, pas le chien ? Le gamin a l'air complètement terrifié, et pourtant Orion ne voit rien qui sorte de l'ordinaire de Weirdtown. Il élabore cependant en précisant sa pensée, et soudain c'est l'éclaircissement.

« Oh, la personne avec les tentacules ! Mais c'est une personne, pas un monstre... fait-il en prenant un air confus. Les créatures ne sont pas des monstres...

Il ne comprend pas vraiment. Certes, la personne aux tentacules peut faire peur quand on n'y est pas habitué - lui-même a eu quelques frayeurs à son arrivée ici... Mais tout de même, de là à la traiter de monstre ! Lui-même est ce que l'on nomme ici une créature, et pourtant, ce n'est pas une bête sanguinaire et épouvantable qui veut manger tous ceux qui passent à sa portée...

Il jette un coup d'oeil là où se trouvait le monsieur, désormais hors de leur vue. Sans doute est-il rentré dans une maison aux alentours.

- Ne t'en fais pas, je suis sûr qu'il est très gentil, lui dit-il en souriant, une once de tristesse cependant visible sur son visage d'enfant. Pourquoi est-ce qu'il voudrait nous dévorer ? Et puis, nous sommes des fantômes, personne ne peut nous manger... tente-t-il de le rassurer. Tu n'as pas à en avoir peur, promis ! »

Sa tentative de rassurer le jeune enfant ne fonctionne pas - il a encore l'air terrifié. Mais il ne craint rien... Comment le lui faire comprendre ? Orion se frotte l'arrière de la tête, l'air peiné : il n'en sait rien.

« Je ne le connais pas, mais je suis sûr qu'il est gentil ! Regarde, il ne t'a pas attaqué en passant à côté de nous..., dit-il en esquissant un sourire qu'il souhaite réconfortant.

Ca n'a pas l'air de fonctionner, car il évoque ensuite le fameux monstre dévorant les imprudents la nuit... El coco. Bien que ça ne fasse pas longtemps qu'il vive à Weirdtown, Orion en a bien entendu parler. Monsieur Bard lui-même l'a mis en garde, puisque travaillant au quartier hispanique : il ne doit pas sortir une fois le soleil couché, car il apparaît alors, et rôde dans le quartier à la recherche de son repas. Nul ne sait quels sont les desseins du croque-mitaine - ou même s'il en a - mais une chose est sûre : Orion en est terrifié.

Bien qu'il soit un fantôme, quelque chose dans la légende d'El coco l'effraie. Il frissonne rien que d'y penser, mais tâche de faire bonne figure face à l'enfant. Après tout, il doit le rassurer, pas le conforter dans sa peur !

- Mais personne ne meurt jamais... n'est-ce pas ? fait-il, plus pour se rassurer lui-même que l'autre fantôme.

Ca semble... marcher ? Il lui annonce essayer de ne plus avoir peur, bien que son ton ne soit pas si convaincant. Alors Orion prend à son tour une grande inspiration, et lui lâche son meilleur sourire.

- Je suis sûr que tu peux y arriver ! l'encourage-t-il. Au fait, comment tu t'appelles ? Moi, c'est Orion ! »

Orion maintient son sourire solaire, tandis que son jeune interlocuteur lui promet d'essayer de ne plus avoir peur. Certes, c'est toujours plus simple à dire qu'à faire, mais une promesse est déjà un grand pas ! Il est si fier de ce petit, et ça se voit dans ses yeux vert sauge.

Il répète son prénom avant de lui donner le sien. Il s'appelle Ethan. C'est un joli nom, qui lui sied bien.

« Enchanté, Ethan ! accueille-t-il ainsi l'information, dévoilant ses jolies quenottes toutes blanches en un sourire étiré jusqu'à ses oreilles. C'est comme s'il venait tout juste de se faire un nouvel ami, et ça le ravit.

Mais... L'autre fantôme lui pose soudainement une colle, le questionnant sur sa manière de ne pas succomber à l'effroi en voyant une créature.

Alors il prend le temps de réfléchir quelques instants, venant se gratter le menton une seconde avant de lui répondre.

- Eh bien... Je suis une créature moi-même, commence-t-il alors son raisonnement, pas très sûr de lui. Et je n'ai pas peur de moi... ou presque. N'a-t-il, après tout, pas eu du mal à accepter sa condition de fantôme ? Oh, que c'était dur de se rendre compte qu'il était encore là, mais plus vraiment. Heureusement qu'aujourd'hui, il a fait le deuil de sa mort et, surtout, de sa famille. Et puis, créatures, humains, animaux... Nous sommes pareils, après tout, nous sommes vivants les uns comme les autres ! Enfin, euh... Presque ? finit-il en se rendant compte de sa bourde, une paume posée sur les lèvres.

Oui, vivants... ou presque, dans leur cas.

Il continue :

- J'ai eu peur du chien tout à l'heure parce qu'il m'a surpris, mais je suis sûr qu'il est très gentil ! rajoute-t-il. Tu ne penses pas que nous sommes tous les mêmes, au final ? » lui demande-t-il, toujours avec un sourire bienveillant.

C'est là son secret : l'habitant du quartier asiatique est trop pur et pense que tout le monde est comme lui. Il ne voit pas la malveillance et cherche trop le bon dans les autres, même lorsqu'il n'existe pas.

Courageux ? Bah, pas tant que ça. Bête ? Un peu... Mais rien n'ébranlera ses convictions.

Tout le monde, il est gentil.

Ouch. Une expression de terreur naît sur le faciès d'Ethan, après les quelques mots d'Orion. Qu'a-t-il dit de si mal ? Il se fige une seconde, ayant soudainement peur d'avoir dit une bêtise. Et c'est si peu penser : le plus jeune fantôme évoque son frère, "terrifiant" selon ses dires. Ah, mince... Il a mis les pieds dans le plat, on dirait.

« Qu'a-t-il de si terrifiant pour que tu en aies aussi peur ? ose-t-il demander. Pour le reste, il opine du chef : Ethan a raison ; ils ne font plus partie de ce monde...

- Mais les "méchants monstres" ne sont pas forcément des créatures... Ton frère est bien humain, non ? Vit-il dans la forêt ? Son opinion sur les créatures et la forêt le laisse perplexe, après tout, il est un scout et il a passé de nombreuses journées à guider les gens entre les arbres, ou à leur parler de la flore, ou à glaner des fleurs pour le magasin. S'il ignore encore quelles horreurs peuvent s'y cacher, il est persuadé qu'elles sont plus la source de on-dit plutôt que la stricte vérité.

Orion a du mal à imaginer une personne mauvaise, pourtant il doit bien en exister... Son frère est-il réellement si horrible ? Son coeur se pince à cette question : le pauvre enfant, que lui est-il donc arrivé ?

- Si tu veux, je t'amènerais dans la forêt. Je te prouverais que toutes les créatures de la forêt ne sont pas méchantes ou dangereuses, fait-il, le visage soudainement rayonnant malgré la gravité de leur conversation. Il est si fier de faire partie des scouts de Weirdtown.

Ethan s'excuse de ne pas réussir à le comprendre.

- Ce n'est pas grave, fait Orion avec un petit sourire qui se veut réconfortant. Puis, soudain, il a une pensée pour le quartier hispanique.

- Mais El Coco ne vit pas dans la forêt... » pense-t-il à haute voix, soudainement. Et c'est vrai : c'est le boss du quartier hispanique en question, chassant les chalands ayant l'audace de sortir après la tombée de la nuit. Lui, on pouvait dire que nombre de gens le qualifient de monstre sanguinaire... Un frisson lui parcourt l'échine. Monsieur Bard, son patron, lui a maintes et maintes fois répétés de partir tôt pour éviter de le croiser à tout prix.

Enfin, lui, il ne craint rien... N'est-ce pas ?

De toute façon, personne n'est jamais réellement mort à Weirdtown. Alors les rumeurs sur El Coco ne sont que ce qu'elles sont : des rumeurs... N'est-ce pas ?

Orion se refuse à croire qu'un tel monstre puisse exister, et pourtant, il sent une pointe de peur dans le creux de son ventre.