Si l’univers pouvait vous rejeter, le ferait-il ? Il n’y a pas un seul instant où Luna ne se pose pas cette question, à chaque fois qu’elle tue pour survivre, à chaque fois qu’elle se gorge de sang, à chaque fois qu’elle voit le cadavre à ses pieds, bien souvent innocent. Cela fait des siècles – suppose-t-elle – qu’elle vit de cette manière, que le monde est son grand terrain de chasse, mais à mesure qu’elle retire des vies, il y a une part d’elle qui se demande : et si on m’avait abandonné ?

Abandonnée des dieux, abandonnée de la vie elle-même, qu’est-ce que cela signifie même de survivre lorsqu’on est un vampire ? Tant de questions dont elle avait les réponses avant d’arriver dans cette ville étrange, toutefois l’amnésie l’empêche de se remémorer quoi que ce soit sur ses conclusions. La vampiresse n’a fait qu’errer ces derniers mois sans trop s’approcher de la ville. Parfois, elle s’y risquait, mais cela l’inquiétait : tout était si différent.

Où sont les grandes maisons ? La verdure ? L’ancien temps qui lui manque tant ? Tout n’est que technologie et illogicité ! Heureusement pour elle sa vie dans la forêt lui va parfaitement bien ! Coupée de tout, dans cette petite maisonnette sous son saule pleureur, jamais elle ne voudrait partir d’ici… Et pourtant, cette ville est comme l’univers, elle la rejette. Il doit bien y avoir un moyen de partir ? Mais à l’heure qu’il est même sonder la grande forêt ne lui a apporté qu’un pur dégoût.

Cette nuit encore, elle va errer en réfléchissant aux autres nuits passées rapidement dans la ville et à l’écoute de toute rumeur utile pour sa fuite… On se doute bien qu’elle a fait chou blanc à ce sujet, néanmoins un détail l’a intrigué et ce qui la pousse à rentrer dans le quartier asiatique. Ici se trouverait quelque chose – une créature peut-être – capable d’offrir des remèdes contre tout pour trois fois rien… Le temps d’un instant, la petite paysanne a l’espoir de se passer de sang et d’arrêter de tuer des gens mais elle se méfie naturellement. Il faut dire qu’une personne pouvant se vanter de tout offrir pour trois fois rien, il y a mammouth sous gravillon !
Mais que voulez-vous ? Luna est désespérée, esseulée et en plus de ça sans sa famille… Alors quitte à perdre du temps autant essayer les choses même les plus impossibles, ce n'est pas comme si elle allait mourir...

C’est ainsi qu’elle se déplace, toujours dans sa longue robe pourpre d’un ancien temps, se déplaçant dans l’air comme une brume indiscernable mais pourtant bien présente. La Dame Pourpre chasse non pas pour se nourrir mais pour trouver « L’Apothicaire », la chose faiseuse de miracles.
Elle commencera par les rues les moins fréquentées – afin de s’éviter une crise de panique mais aussi qu’on ne la reconnaisse pas – tout en portant par-dessus sa robe un voile pourpre cachant ses yeux si profonds et inquiétants… Elle n’a eu qu’une courte description physique entendue çà et là ainsi qu'une position approximative la nuit mais cela devrait suffire non ? Après tout on peut tout trouver à Weirdtown, du moment qu’on essaye de chercher.

Alors si c’est le destin qui l’amène à cette personne, celui-ci se montrera des plus ironiques, non ?... Regardez, c’est exactement pour ça qu’il se joue de nous, qu’il nous teste, Luna a la ferme conviction que lui aussi l’a abandonné à un sort des plus tragique. Sa descente sera lente, douloureuse, comme s’Il cherchait à la faire souffrir proportionnellement à toutes ses victimes.

C’est devant un temple que la vampiresse s’arrête, le regard rivé sur les Torii puis le lieu qui est d’une religion qui n’est pas connue de la poupée. Est-ce qu’elle se sentait mal à l’aise ? Oui mais c’est loin d’être aussi violent que les églises de son ancienne vie de paysanne alors… peut-être qu’elle n’avait rien à craindre de cet endroit ? Quittant l’étrange arche rouge, ses yeux semblables à deux puits sans fond se posent sur deux personnes : un homme cherchant à faire une chose que Luna qualifie d’animal… Et… Cette créature ? Une robe colorée, bien différentes de ce qu’elle porte habituellement, les oreilles pointues, les crocs puis ses yeux. Aucun doute ne la traverse, c’est l’Apothicaire tant recherché.e.

La scène ressemblait plus à une agression qu’autre chose, la poupée ne peut que constater qu’une pauvre dague sortie qui laisse l’animal indifférent, c’est même pire, ça aggrave son cas. Aussi silencieuse qu’une brise, la chasseresse s’arrête à quelques mètres et annonce sa présence à l’animal, son œil pourpre luit d’une pitié tandis que la pupille noire profonde dégage une haine incommensurable.



À ces rimes poétiques, la poupée montra ses crocs acérés, signe irréfutable de sa nature vampirique. C’est un monstre qui, même si elle semble calme, n’apporte que la mort et désolation sur son chemin. Malgré ça, la vampiresse a la désagréable impression que les choses peuvent tourner au drame. Est-ce l’état de cet animal qui l’alerte ? Ou bien le calme étrange de « l’Apothicaire » ?... Quoiqu’il arrive, la Dame Pourpre n’hésitera pas à tuer pour qu’on laisse tranquille sa prochaine « proie ».

La poupée sonde la personne alors que l’animal décampe des lieux comme s’il avait vu l’un de ses plus grands prédateurs. Nul besoin de le courser, tôt ou tard, il finira par subir à son tour ce qu’il a tenté de faire. Que ce soit de la manière dont il voulait procéder ou de mourir dans d’atroces souffrances. Mais ceci est une autre histoire qui ne mérite pas d’être racontée, au lieu de ça, il vaut mieux se concentrer sur cette nouvelle œuvre : celle d’un Apothicaire prêt.e à promettre monts et merveilles grâce à ses potions en tout genre.

Alors qu’il se présente comme tout bon marchand, la vampiresse l’analyse en ayant une désagréable sensation : elle ne sait pas si elle doit dire « monsieur » ou « madame », dans le doute elle l’appellera par le nom qu’iel se désigne : Apothicaire. Nul besoin de l’avoir comme ennemi.e pour l’instant. Méfiante comme à ses habitudes, Luna reste distante en fixant la personne puis ses grigris dans sa valise.



Telle une dame d’un temps lointain, celle-ci le salut d’une simple révérence en soulevant légèrement sa robe avec une grâce propre à la haute société : ce n’est point un.e noble, elle n’a pas à plus s’appliquer plus que ça.



Bien évidemment que la poupée doute franchement que cette personne possède un tel breuvage, on ne peut faire de la magie avec le vampirisme… Les choses sont telles quelles sont, il n’y a que les fous qui portent de l’espoir de redevenir comme avant. Et pourtant…Elle a l’étrange souvenir qu’un de ces fous était proche d’elle. Qui ? Pourquoi ? Jamais elle ne trouvera la réponse tant qu’elle ne se sera pas échappée d’ici.

Contre toute attente, l’Apothicaire semble avoir ça dans son stock comme si ce remède si spécial attendait sagement la venue de la vampiresse. Iel sort un flacon contenant un liquide pour le moins étrange aux yeux de la poupée. Cette couleur si attirante ne lui dit rien qui vaille… Ce sourire, qui plus est, n’augure rien de bon. Sa vie a été faite de traîtrise, de coup dans le dos, de tromperie, et ces sensations ne sont jamais parties de sa chair et de ses souvenirs, comme un avertissement à une prochaine félonie.

Ce qui la surprend le plus c’est la nature du paiement… Elle s’attendait à des pièces, de l’argent mais absolument pas à quelque chose d’aussi intangible que des souvenirs… SES souvenirs. Est-ce vraiment possible de prendre comme ça ? Après une courte réflexion, cette ville semble avoir fait la même chose à son esprit. Instinctivement la poupée recule, son regard se fait inquisiteur, presque belliqueux. Pour qui se prenait-iel ?!



Et si ce n’était que ça qui la gênait. Un paiement aussi lourd pour une seule et unique fiole, la poupée trouve que la balance est trop en faveur de cette personne.



Elle cherche à se passer de victime humaine afin de ne plus être cette chasseresse nocturne néanmoins avec cette étrange façon de faire, la poupée pourrait très bien se passer réellement d’espoir de trouver une alternative. Qui est donc réellement cet.te Apothicaire au sourire si perfide ?

Mécontent.e, l’Apothicaire range ses affaires et s’apprête à partir en disant simplement que c’est ellui qui fixe les prix à sa convenance peu importe si ça plaît ou non à sa clientèle. Un mois entier sans avoir à se nourrir de sang ?... Cela serait merveilleux mais probablement pas bénéfique finalement, vous savez pour quelle raison ? Car elle va « perdre » l’habitude de chasser comme chaque nuit. Ce n’est pas comme si elle pouvait avoir des domestiques qui lui ramenaient des Cygnes.

Néanmoins, cette fiole peut lui servir en cas d’extrême urgence, alors, lorsqu’iel repropose l’échange la poupée pousse un soupir sans air avant de lever un doigt.



La poupée baisse les yeux, s’il y a bien une chose qui la terrifie c’est de ne plus se souvenir de Méli, de Sion, et des rares liens qu’elle arrive à percevoir dans son esprit embrumé. Cela se ressent, ce n’est pas du désespoir, c’est un tourment sans fin qui règne chez cette vampiresse.



Elle relève ses yeux vairons profonds, affichant une moue désolée. Elle n’a pas été des plus gentilles non plus dans son attitude, elle le ressent et comme une lady, elle s’excuse avec politesse.



Tout ce qui est présent dans cette ville est étrange, les personnes, les structures, la vie en elle-même… La poupée est terrifiée de tout ce monde qui change alors qu’elle ne semble pas avoir mérité d’avoir un tel châtiment. Les dieux l’ont vraiment abandonné ici, sans aucune explication.

Ses mots semblent… Toucher l’Apothicaire. Est-ce par opportunisme d’avoir une cliente affaiblie par le poids des années ou bien par empathie ? Luna ne saurait le dire car elle est loin d’être douée pour percevoir la nature véritable des gens. Elle vivait dans son cocon la plupart du temps, loin de la civilisation, loin de tout. Mais même avec ça, la traitrise était présente à chaque coin de son ancienne forêt à Orhune – bien évidemment, elle ne connaît plus le nom de cette dernière.

Iel la rassure sur les souvenirs, iel ne les voles pas mais semble avoir la capacité de les savourer de la même manière que la vampiresse boit du sang. C’est étrange comme procédé. Est-ce qu’elle peut laui faire confiance ? Non. Mais si elle ne donne pas un minimum de confiance à quelqu’un, à qui peut-elle parler en dehors de sa maisonnette ? Par contre, iel parle d’affliction, d’être maudit.e, bien qu’iel ne ressemble pas aux humains lambdas, la poupée ne comprenait pas.

Brutalemment, l’Apothicaire tousse jusqu’à s’en faire recracher les poumons !



Qu’est-ce qu’iel arrive à cette pauvre personne ?! La poupée est un peu désemparée et totalement décontenancée en voyant ce qu’iel recrache… De la violette ?... Comment était-ce possible ce genre de chose ? Iel se répète : ils sont tous maudits dans cette ville. Chacun a sa propre affliction ? Est-ce une conséquence de rester en ville ? Quel est l’intérêt de cet endroit bon sang ?!



La poupée s’en veut un peu plus de s’être « énervée » contre laui… Peut-être cherche-t-iel à se sauver de ça, et que ses ventes lui permettent de se rapprocher de son propre remède face à cette affliction qui lae ronge ? À la demande, la poupée hésite un instant avant d’opiner du chef.



Au lieu de rester plantée au milieu de passage, la poupée fend la distance entre laui et un banc afin de s’installer confortablement. Maintenant que pouvait-elle raconter ?... Elle posa malgré tout une question, elle doit savoir sur quoi iel veut s’embarquer.



Elle attendait patiemment sa réponse, faisant le tri dans sa tête et cherchant ce qui pourrait être intéressant… Mais la douleur de certaines de ces réminiscences lui étreint son cœur nécrosé.

Un souvenir heureux, donc… La poupée prendra bien plus de temps pour s’en souvenir car ils sont peu nombreux mais chers à son cœur. Même si elle ne s’en souvient pas, elle ressent des sensations en voyant certaines choses, comme la broche qu’elle porte constamment sur elle. Ce bleu azur lui rappelle quelque chose de joyeux mais elle ne s’en souvient pas pour autant, ce qui la frustre. Mais avant de réfléchir plus profondément à la demande, l’Apothicaire s’explique sur sa situation.

Attentive, Luna scrute ce.tte dernier.ère en essayant de comprendre cette situation quelque peu étrange à ses oreilles. Cette personne était une épée ayant vu un bon nombre de guerres, de sang et de mort au fil du temps et de sa lame… Une épée vivante ? C’est seulement possible ? Elle avait tant de questions sur cette créature et se demandait sincèrement si aujourd’hui iel vit d’une façon qui lui plaît ? Il est toujours difficile d’accepter une nouvelle condition de vie, surtout quand on change du jour au lendemain. Que ce soit en monstre comme la vampiresse ou en humain comme l’Apothicaire.



La Dame Pourpre emprunte « son corps » de temps en temps et la Luna actuelle ne peut rien faire à part attendre et subir toutes les bêtises d’une noble princesse un peu trop sûre d’elle. Et ceci ne vient pas que de Weirdtown, cela vient aussi d’avant… Ça a duré… Longtemps, pense-t-elle avant de hocher la tête pour le souvenir heureux. L’ancienne épée semble contente d’écouter des souvenirs joyeux alors, Luna va lui offrir… non pas pour la potion, mais surtout pour lui alléger ses peines. Elle est empathique face aux créatures qui ont un vécu similaire mais qui se battent malgré leur précédente condition pour rester dans le fil de la vie et s’accepter malgré tout. La poupée ferme les yeux, tentant de se remémorer ce qu’elle ne voudrait jamais oublier, son plus beau souvenir.



Voici l’un de ses rares souvenirs de son frère de cœur… À mesure qu’elle parlait, sa main s’est portée à sa poitrine au niveau de son cœur. Elle se serrait à mesure que ces songes revenaient à sa mémoire.



Elle ouvre de nouveau ses deux puits sans fonds en regardant l’Apothicaire. Ce souvenir a fait plus de dégât qu’elle ne l’imagine car des larmes de sang roulent lentement sur ses joues de porcelaine. Heureuse ou triste ? Difficile à savoir. Elle ne semble pas l’avoir remarqué…

Est-ce que cela avait plu ou non ? Il semblerait, peut-être ? Difficile à dire quand on ne connaît pas bien la personne et Luna avait un peu de mal à cerner les gens dans toute leur profondeur. Comme avec Sion, elle a pris beaucoup de temps pour saisir sa détresse mais aussi se montrer présente… Quelle détresse ? Elle ne se souvient plus, c’est… Horrible de ne plus se souvenir d’une chose si importante. Que reste-t-il à une créature de la nuit qui vit éternellement si on lui retire ses souvenirs ? Une coquille vide. Luna en avait déjà fait les frais, par le passé.

Alors qu’iel tend un magnifique tissu, la vampiresse remarque enfin ses propre larmes et vient à ellui sourire pour la première fois. Une moue de compassion et de désolation, elle aurait préféré garder ses larmes pour chez elle, loin de tous les yeux et jugements des habitants. Acceptant ce court présent, il ne lui faut que deux tours de main pour effacer ces rivières sanglantes et ainsi rendre le tissu de soie en s’excusant de ne pas avoir quoi que ce soit pour le nettoyer.

Après l’avoir remercié pour cette histoire, l’ancienne épée trifouille ses affaires afin de sortir un objet : une radio. Est-ce que Luna sait ce que c’est ? Pas des moindres, dans son temps la musique se jouait avec des vrais instruments… Alors en entendre, des différents, via une si petite boite. C’est à se demander si les musiciens n’étaient pas coincés à l’intérieur, obligés de se plier à la volonté de l’Apothicaire. Plus rien n’étonnerait Luna à ce niveau, aussi elle ne dira rien à ce sujet. Mais une question lui échauffe l’esprit : pourquoi mettre de la musique ?

C’est après avoir trouvé la bonne « piste » qu’iel tend une main avec une proposition qui étonne la poupée. C’est audacieux, inattendu mais en même temps cela lui réchauffe son cœur mort. Elle ne connaît pas bien cette personne et pourtant iel veut lui raviver ces choses qu’elle n’a pas pu faire depuis longtemps ? Ce n’était ni un vampire, ni une créature de la nuit qui aurait pu lui planter un couteau dans le dos. Non, ce n’est qu’un.e inconnu.e qui est apparemment sincère.

Avec douceur, la poupée se saisit de la main et se redresse sur ses petites jambes. S’iel en doutait, la poupée est aussi froide que la mort. Plus rien ne vit en elle et pourtant elle est bien présente, ici, prête à se lancer dans une danse.



La poupée fit une moue navrée en levant ses yeux vairons vers l’Apothicaire, néanmoins avant de commencer quoi que ce soit, celle-ci demande :



Et non la Dame pourpre qu’elle préfère donne aux personnes dont elle n’a pas une seule petite pointe de confiance… La poupée jongle entre ces deux appellations, Luna De Noctis, ou Dame Pourpre, tout dépend du degré d’appréciation qu’elle a envers vous. Une main tendue après un souvenir heureux mais douloureux, ne peut que la rassurer… Iel n’est point méchant.e, au contraire.

Se laisser guider par la musique ? Ces mots ravivent en elle quelques ressentis de déjà-vu sans vraiment savoir comment, ni pourquoi. Pouvait-elle ressentir la chaleur de la main de l’Apothicaire ? Non, malheureusement, mais son geste est amplement suffisant pour que la poupée retrouve ce qu’elle n’a jamais pu ressentir après son « éveil ».

Luna n’est pas des plus douées à la valse, c’est vrai. Même si elle a eu un très bon instructeur, elle n’a jamais pu perfectionner cet art à son summum, à part dans ses pensées. Alors, elle fait du mieux qu’elle le peut, essayant de se souvenir ce qu’on a pu lui apprendre par le passé. Un, deux, trois, un, deux, trois… Ses erreurs viennent du fait qu’elle soit tendue, mais à mesure que la musique continue, la confiance revient sans plus tarder, enfermant sa gêne qui n’est devenu qu’un vulgaire songe.

C’est déroutant, jamais elle n’aurait cru danser ce soir. Jamais elle n’aurait cru se sentir submergée par ces anciennes émotions. Sa robe ample virevolte au vent et accompagne le mouvement des deux créatures avec une grâce presque pure. Cette sensation de légèreté l’envahi comme si, le temps d’une musique, le monde autour s’est arrêté. Ses problèmes, ses peurs, son tourment sans fin, tout ceci est figés dans les mouvements incertains de la vampiresse. Elle est comme une poupée d’une boite à musique, tournoyante, encore et encore, voyant le monde et les étoiles se dessiner d’un coup de pinceau grossier mais magnifique. Pour la première fois depuis bien longtemps, Luna esquisse un sourire satisfait, oubliant tout à fait l’existence de cette ville et de ses bizarreries.

Iel choisit ce moment pour lui expliquer sur l’origine de son nom, et de son prénom. Inari pour le nom hérité de sa divinité, Madara pour le prénom qu’il a désiré. Néanmoins iel préfère qu’on le nomme Apothicaire car c’est son tout, son un, iel existe pour son métier et ceci a quelque chose de touchant. Si une ancienne épée est capable de se donner un but dans la vie, alors tout le monde est capable de faire de même.



La musique s’arrête peu après cette conversation et cette fois, Luna ne voit plus l’Apothicaire comme un charlatan – merci les a priori - mais comme une aimable personne qui mérite le respect. La poupée fera une véritable révérence comme guise de remerciement, sachant très bien que les mots ne sont pas utiles dans ce moment. Pourquoi lea remercier alors qu’on a souri à pleine dent ?

Lorsqu’iel reprend place sur le muret, iel démontre l’ironie de cette situation et iel n’a pas tort. La poupée fend la distance afin d’être non loin de ses côtés sans trop se rapprocher. Suivant le mouvement, ses yeux sans fonds se perdent dans le ciel nocturne.



De Weirdtown, Madara est la première personne qu’elle a pu parler « normalement » sans trop se « retenir ». Plus qu’un marchand, l’Apothicaire a aussi un don pour attirer la sympathie et la curiosité. Est-ce qu’iel va se souvenir de cette rencontre comme un présent ou un simple passage d’une cliente ? La poupée n’a pas envie de le savoir, pour l’heure, elle profite de cet instant car il est rare.



Face au temps, la poupée ne peut que se laisser aller. Une décennie cela va vite pour les êtres qu’ils sont, et cela s’aggravera au fur et à mesure des décennies qui passent. Maintenant que la calme est revenu, la poupée aimerait en savoir plus sur l’Apothicaire… A moins que ce.tte dernie.ère ne soit pas en accord pour passer du temps à bavasser.

Loin de s’imaginer ce que traverse l’Apothicaire dans ses pensées, la poupée accepte ce silence en guettant la lune grimpée dans le ciel nocturne. Pourquoi l’avait-on appelé Luna ? Qui étaient ses parents humains ? Est-ce qu’elle les aimait ? Est-ce qu’elle les détestait ? La seule réponse qu’elle arrive à trouver dans cette époque floue n’est qu’une petite douleur dans son cœur nécrosé. Douleur ou bonheur, difficile à dire pour une vampiresse qui n’a aucun souvenir. Cela dit, ce n’est point pour ça qu’elle va déprimer. L’important est de pouvoir rentrer « chez elle » dans sa petite maisonnette, la vraie, qui ne se trouve pas ici à Weirdtown. Ça elle s’en souvient très bien. Des personnes doivent l’attendre loin d’ici, peut-être même qu’elles s’inquiètent de son départ soudain ? Tout ce qu’elle a c’est un faible espoir de pouvoir les revoir… Et leur dire de nouveau à combien elle les aime.

Une nouvelle quinte de toux survient à l’Apothicaire… Des nouveaux pétales sont crachés sans que la poupée ne puisse faire quoi que ce soit pour l’aider. C’est grisant. C’est après avoir repris son souffle qu’iel reprend le fil de la raison de la venue de Luna expliquant la vérité. Ah… Iel avait menti sur la potion ? Qu’allait-iel lui donner alors ? Un poison ? Si iels n’avaient pas parlé cela aurait pu tourner au drame car Luna l’aurait cherché pour se venger, telle la chasseresse qu’elle est.

La poupée pousse un soupir sans air…



Un traitement qui lui permet de ne plus boire de sang de manière presque définitive ? Juste une concoction à boire une fois par mois ? Cela relève presque du miracle et elle sent au plus profond d’elle que ce remède aurait mieux servit à quelqu’un d’autre… Mais qui ?... Instinctivement pose sa main glacée sur sa broche du Dragon Bleu.



Elle s’en doute un peu, si une concoction qui permet de ne plus boire de sang existait, les vampires ne s’attaqueraient plus aux humains. Cependant à ses souvenirs, cela n’a jamais changé en plusieurs siècles. Preuve que cette potion miracle n’a pour l’instant jamais pu voir le jour. Son regard sans fond se pose sur les pétales étalés sur le sol, songeuse.



Dans un monde aussi bizarre que celui-ci, le mieux est de se serrer les coudes et si la vampiresse peut aider une pauvre personne atteinte d’une maladie alors elle le fera. Ce n’est pas de la pitié, c’est de l’empathie et de la volonté d’aider son prochain à sa manière. C’est… instinctif en elle…