C'était le calme plat dans la forêt de Weirdtown où le vent lui-même, en ce jour, ne semblait même pas daigner à venir souffler entre les branches des arbres. Seul les grognements d'un homme se faisait entendre couplé aux bruissements d'un buisson qu'on chahutait. S'asseyant en tailleur, le dos courbé, Javier affichait une moue fatiguée : il venait de se réveiller au milieu des taillis, alors que le soleil était déjà haut dans le ciel. Le regard de l'espagnol déviait lentement de droite à gauche, comme un homme qui se réveillait avec une gueule de bois après une longue nuit de beuverie, alors qu'il cherchait à retrouver ses esprits. Pas d'ombre dans le coin de ses yeux, aucune trace d'un visiteur peu soucieux de sa sécurité devant lui, il n'y avait personne dans sa forêt. C'était trop silencieux, même pour ce résident habitué au mutisme de la nature.

Alors l'homme décida de se lever, titubant vers l'orée de la forêt : peut-être qu'aujourd'hui, il irait faire un tour en ville.

Javier alla au quartier hispanique, cela allait de soi, une grimace collée au visage. Y avait-il toujours autant de monde, la journée ? C'était pour ça qu'il se déplaçait toujours la nuit, parce qu'il pouvait faire ce qu'il voulait, et qu'il était seul. Enfin.. Presque seul, El Coco était une menace bien réelle, il le savait, mais si le boss savait se déplacer silencieusement, Javier était persuadée qu'il pourrait se montrer plus rapide.

Des visages joyeux, des cris de joie, le jeune homme crut même de voir le sourire radieux d'une jolie femme lui être adresser, ce qui lui arracha un rictus en coin et un regard fier. Javier se contenta de remettre ses lunettes étoile en place avant de se retourner pour essayer de retrouver cette charmante dame. Elle avait déjà disparue, et Javier put apercevoir, au loin, le physique noir et blanc d'un boss qui n'était pas dans son quartier habituel : Goosebump.

"Hostia !"

Bien qu'un peu surpris, Javier ne détourna pas le regard pour autant, décidant de mettre une main à côté de son œil pour ne avoir la petite gamine dans son champ de vision. Si j'la vois pas, elle est pas là. Pouffant de sa propre bêtise - car il le savait, si Goosebump décidait de pointer ses doigts dans sa direction et de crier BANG!, personne ne pourrait l'arrêter -, le jeune espagnol se dirigea vers une scène bien plus intéressante.

"Ay, tu fais quoi mon po.., il se coupa la parole lui-même, hé, mais c'est du chocolat!"

Tandis que l'autre se barbouillait de chocolat, Javier lui, plongeait et sortait sa main pour faire plusieurs couches de chocolat dessus. La boss du quartier caucasien parlait toujours, il crut entendre une histoire d'œuf, de chocolat, d'équipe.. mais ça lui passait au dessus de la tête alors qu'il montrait sa main enveloppée de chocolat à son acolyte, aussi fier qu'un enfant le serait.

"J'sais pas c'qu'elle a dit, man, mais moi je me barre au bar à tapas"

Javier laissa l'homme à ses occupations, lâchant un "¡Arriba!" dès plus cliché avant de pouffer de rire.

Un autre homme vint à la rencontre du duo, un prénommé Minho Bakh, ce qui voulait dire que le p'tit gamin était Donatello. L'espagnol tendit la main pour attraper les mouchoirs du nouvel arrivant, les fourrant dans sa poche sans un mot. S'il croyait qu'il allait se débourber la main, il se mettait le doigt dans l'œil. Son regard alla de Minho, à Donatello, et Javier se fit la réflexion suivante : Donatello venait d'arriver en ville, Minho ne la connaissait pas et lui.. lui il ne ne venait jamais non plus.

"Bah on est pas rendu, dit-il en hochant la tête"

Le plus vieux emboita le pas, dirigeant la petite troupe vers le bar à tapas qu'il avait vu un peu plus tôt.

"J'sais pas mon gamin, normalement c'est du verre, j'crois pas que mes lunettes se soient changé en sucre, répondit le moustachu en haussant les épaules, puis pour l'œuf j'en sais rien non plus. J'suis aussi paumé qu'vous."

Une fois arrivés au bar à tapas, Javier ne put s'empêcher d'afficher une grimace, il venait de remarquer que tout était en chocolat, y compris les chaises, les murs, le sol et surtout les tapas. Faut pas mourir de faim aujourd'hui se dit-il en soufflant bruyamment. Adressant un regard en coin à ses camarades, le moustachu s'approcha du comptoir sans grande conviction. Fallait trouver un œuf, alors ? Son regard fatigué se dirigea vers un papier sur le comptoir : c'était un ticket.. un ticket qui attira l'œil de l'espagnol qui le prit nonchalamment de sa main gauche, celle qui était couverte de chocolat.

"Mierda."

Le chocolat cacha quelques informations, mais on pouvait y lire 'C'est un end [lettres couvertes de chocolat] fréquenté qui rassemble les gens, il [lettres couvertes de chocolat] flet de notre culture et nous sert [lettres couvertes de chocolat] de divertissement. Saurez [lettres couvertes de chocolat] ouver l'œuf avant qu'il s'ouvre totalement?'. Javier regarda ses camarades rapidement, il venait de faire une boulette, là, c'était sûr. Sortant les mouchoirs de sa poche, l'espagnol tenta tant bien que mal de retirer le chocolat du ticket. La sucrerie s'étala sur le ticket, il était maintenant possible de lire le message, mais une fine couche marron teintait la blancheur initiale.

"Bon, les gars, Javier s'approcha de ses camarades, j'ai trouvé un indice j'crois, attends je vais lire.. C'est un endroit très frétenté, fréquenqé.. nan attends.. Fréquenté !, qui rassemble-uh les gens.. C'est le reflet de notre cuture.. cul-ture.. et nous sert aussi de di-ver-ti-ssement. Saurez-vous blabala, fin faut trouver l'œuf quoi."

Javier afficha un sourire stupide, bien conscient de sa piètre performance. J'suis sûr que le gamin lit mieux que moi.

"Y a pas beaucoup de livre dans la forêt, les gars, donc faut pas se moquer, il leva le doigt pour les mettre en garde - il n'était pas énervé cependant -, pis j'suis espagnol, no hablo otro idioma"

Le jeune homme réfléchit un instant, endroit de culture, rassemblement, divertissement.. ne s'agissait-il pas de ce musée, qu'il pouvait voir au loin depuis sa forêt ?

"J'vais aller au musée, on verra bien, tiens"

De sa main gauche - couverte de chocolat -, Javier tenta de mettre le ticket dans une des poches de Minho avant de lui adresser une tape amicale sur l'épaule - toujours avec la même main -. Par la suite, il adressa deux pouces en l'air au gamin, le questionnant du regard du style 't'es chaud patate ?'.

"Aller, on s'retrouve après."

Seul à nouveau, Javier prit la route vers le musée.. du moins, il déambulait dans les rues, sans vraiment chercher le bon chemin. L'odeur du chocolat commençait déjà à lui prendre au nez, et il espérait pouvoir trouver l'œuf rapidement. Une fois arrivé au musée, l'homme ne chercha pas à savoir s'il fallait acheter un billet d'entrée - façon, il était fauché - et se faufila dans la foule, percutant certaines personnes qui pestèrent contre lui. L'intérieur, sans surprise, était fait de chocolat : les tableaux, les sculptures, tout.

Dinguerie, s'exclama l'homme alors qu'il posait ses sales pattes dégueulasses sur tout l'art qu'il pouvait toucher.

Et alors qu'il continuait sa besogne - qu'il savait bien irrespectueuse - Javier réussit à dénicher un deuxième message. Serait-ce un indice ? Javier savait lire, évidemment qu'il savait, il avait - avant de rejoindre Weirdtown - lu les dizaines et dizaines de journaux à son sujet, là où ça péchait, cependant, c'était pour comprendre le sens du message. "Qui a dit que vous aviez le droit de courir en ce lieu? Il a beau y avoir de la place, cassez quelque chose n'est pas un jeu. Qui sait ce que l'œuf signifie, allez, faites un vœu." L'espagnol fronça les sourcils, c'est un pas un message qui va me faire la morale!

Alors oui, il pourrait rejoindre ses camarades, demander à Minho et au petit Donatello leur avis sur ce message, mais la seule idée de refaire le chemin inverse le décourageait fortement. De plus l'homme n'était pas aveugle, et s'il n'avait pas rechigné sur le moment, le regard que le gamin lui avait donné ne lui avait pas échappé. Alors au lieu de rejoindre ses camarades, le jeune espagnol tenta de repérer quelqu'un dans la foule, quelqu'un qui pourrait l'aider à comprendre le message qu'il venait de trouver, et il la trouva, cette petite dame.

...

"Aïe aïe, c'est bon, c'est bon j'm'en vais, roh, ronchonna l'espagnol en s'éloignant d'une femme en colère, si c'est pas moi, c'est personne, solterona!"

Javier s'était approché de cette vieille femme, un sourire carnassier aux lèvres, lui avait demandé son aide - qu'il eut - et avait décidé de discuter un peu plus avec elle. Puis d'un coup d'un seul, elle s'était énervée contre lui, le traitant de goujat, de mec répugnant et l'homme n'eut d'autres choix que fuir ses coups. J'ai rien fait pourtant. C'est vrai quoi, il n'y avait rien de mal à proposer d'aller boire un petit verre pour qu'elle puisse lui conter ses histoires de quand elle était belle, avant que le temps ne vienne prendre sa jeunesse.

Avec toutes ces péripéties, Javier remarqua qu'il lui manquait quelque chose : le papier/l'indice. L'espagnol jura, le papier s'était sans doute envolé alors qu'il fuyait la vieille folle. Soufflant de colère, Javier décida de rester et de chercher.